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La socialisation
La socialisation du chiot
Le mot « socialisation » est généralement connu mais rarement pour toutes les notions et le travail qui en découlent. Pour beaucoup, un chien sociable, c’est un chien qui n’est pas bagarreur « il est gentil ». Si l’on devait définir réellement un chien dont la socialisation a été réussie, cela donnerait :
« Un chien émotionnellement stable, qui sait faire face au stress physique et psychique, qui sait s’adapter à n’importe quelle situation, qui est adroit, attentif, volontaire et concentré, qui va au contact de n’importe quel être vivant pour interagir de manière positive etc »
Vous allez me dire que certains chiots, lors de leur arrivée chez leurs adoptants, n’ont pas certaines de ces caractéristiques et qu’il faudrait beaucoup de travail ou peut-être même qu’il serait impossible de leur faire acquérir. C’est parce que le travail de socialisation a été débuté à ses 2 mois et demi ou 3 mois alors qu’il aurait dû l’être beaucoup plus tôt, chez l’éleveur !
COMPORTEMENT = 20% de génétique + 80% d’éducation (socialisation, condition de vie, interactions, expérience etc)
Le premier être à avoir une influence sur le caractère du chien, sera la mère.
I) L’importance du travail de la mère
L’impact de la mère sur les chiots est double : elle peut leur transmettre des tares génétiques et elle fait office de modèle, entraînant ses chiots à reproduire ses troubles du comportement. C’est pourquoi, l’éleveur doit toujours choisir avec soin ses reproductrices qui ne doivent être ni peureuses, ni inhibées, ni impulsives mais bien socialisées, matures et ayant de bons autocontrôles.
L’apprentissage des autocontrôles est unes des missions principales de la mère pour les petits (et c’est pourquoi les chiots orphelins sont toujours une situation très délicate).
Les autocontrôles correspondent à un animal qui serait capable d’interrompre volontairement un comportement, une action en cours. Il s’agirait de la clef de la socialisation et de l’habituation. L’apprentissage d’autocontrôle se ferait essentiellement lors des jeux et des interactions avec la fratrie ainsi que la mère.
Exemple de l’acquisition de l’inhibition (autocontrôle) à la morsure :
Selon le degré d’excitation d’un jeune chiot, il peut mordre un peu trop fort son frère qui lui, déclenchera une réaction de plainte, de douleur ou de défense. La mère va intervenir pour séparer les jeunes en mordant le fautif jusqu’à qu’il lâche l’autre chiot. On n’imagine pas toujours, mais les bagarres de chiots peuvent être d’une extrême violence surtout s’il n’y a pas d’adulte mature et compétent pour intervenir… La présence de la mère (ou autre adulte) est indispensable afin d’imposer au chiot d’arrêter de mordre puisque c’est la punition de la mère qui entraîne l’arrêt de comportement. Si le chiot continu de mordre, la mère continue d’intervenir. Progressivement, le chiot va comprendre que s’il mord moins fort, non seulement la mère ne va pas intervenir et le frère va bien vouloir continuer le jeu en cours. La morsure inhibée est généralement acquise aux alentours des deux mois.
Un chien orphelin mal socialisé, ou séparé trop tôt de la fratrie et mère, ne saura pas contrôler l’intensité de sa morsure : en lui tendant une croquette il pourrait vous arracher la main sans même le vouloir. On parle aussi des chiens qui ne savent pas s’arrêter lors d’une bagarre….
La régulation maternelle est réellement essentielle puisqu’elle s’exerce sur l’ensemble des comportements moteurs. Elle interagit avec ses chiots en les poussant, les maintenant au sol, leur enseignant les règles des jeux. Les défauts d’acquisition des autocontrôles auraient un caractère quasiment définitif. Sans intervention précoce, avant les 4 mois, les circuits inhibiteurs ne seraient pas activés et il serait très difficile de rétablir une capacité d’inhibition minimale.
II) L’importance du travail de l’éleveur
Chez le chien, il existe 4 périodes de développement (Scott 1958 ; Jagoe et Serpelle 1995) ainsi que la période prénatale pendant laquelle le fœtus n’est pas totalement isolé de l’environnement extérieur : il peut percevoir le stress de sa mère via des facteurs neuroendocriniens présents dans le liquide amniotique.
A) >> Période néonatale du 1er jour de vie au 13e jour
Pendant plus ou moins les deux premières semaines de vie le chiot est dans une phase végétative pendant laquelle il est sourd, aveugle, incapable de réguler lui-même sa température corporelle et ne peut bouger qu’en rampant. Il va développer les sens tactiles et gustatifs pendant que les compétences sensorielles et motrices vont s’accroitre progressivement.
B) >> Période de transition du 14e jour aux 21-25e jours (3 semaines)
Le chiot a développé ses sens. Il commence à identifier sa mère par mémoire des formes, odeurs caractéristiques et mémoire sonore.
C) >> Période de socialisation du 21-25 jours (3 semaines) aux 77-84e jours (12 semaines)
L’une des plus importantes dans la formation de la future vie de l’individu. Il apprend la communication.
D) >> Période juvénile de 12 semaines jusqu’à la maturité sexuelle
De 3 semaines jusqu’à 4-5 mois, le chiot est dans une période très sensible, « l’Ontogénèse » pendant laquelle il construit, en fonction des stimuli de l’environnement rencontré, une banque de donnée. Pendant cette période, les évènements extérieurs sont capables d’influencer le comportement de l’animal, lors de sa vie d’adulte et de façon durable. Celle-ci lui permettra de mettre en place son homéostasie sensorielle et ainsi de pouvoir gérer son futur environnement. L'homéostasie sensorielle correspond à l’état d’équilibre entre un organisme et tous les stimuli de son environnement à un instant donné.
Un chien ayant une homéostasie sensorielle correcte ne réagira pas à un stimulus normal de son environnement ou sera capable de s’y adapter afin de retrouver un état d’équilibre. Si le chiot est élevé en niveau hypostimulant, il présentera soit des réactions de peur à chaque stimulus excédant son niveau moyen de tolérance (syndrome de privation sensorielle) soit une hypersensibilité aux stimuli de l’environnement (hypersensibilité souvent associée à de l’hyperactivité).
Pour assurer un bon développement sensoriel, l’éleveur doit soumettre les chiots à des stimulations diverses et variées de manière progressive et répété dans le temps (rappel de l’âge légal de vente 8 semaines) :
Des stimulations visuelles dès l’âge de 3 semaines :
- - Leur laisser à disposition autant de jouet que le nombre de chiots dans la portée pour faciliter le jeu avec des jouets/objets de formes, de couleurs et de consistance variées (peluches, jouets durs, en plastique etc)
- Leur installer des structures pleines, creuses et mobiles (balles, pneu etc)
- - Contact visuel avec d’autres chiens, espèces à travers une vitre ou un grillage
- Sorties en ville (idéalement 2/3 par semaine)
Des stimulations auditives dès l’âge de 3 semaines :
Des bruits de toutes sortes que ce soit en extérieur ou sur CD (dans le cas d’élevage isolé) (voix humaines, bruits d’animaux, bruits de circulation, de ville, de maisons (aspirateurs, portes, éclats de verre, bruits de poches plastiques), bruits d’orage, de pluie etc
Exemples :
Des stimulations tactiles dès la naissance :
Manipulation plusieurs fois par jour des chiots (les peser, les caresser, les brosser, le poser sur une table (pour les consultations vétérinaires) etc)
Des stimulations olfactives :
- Laisser les chiots explorer le plus possible
- Disperser des récompenses alimentaires pour qu’ils pistent
Des exemples de "parcours" ou "obstacles" de courage afin d'assurer un bon développement sensoriel